TERRES COMMUNES

Journée 1

ORGANISER LES COMMUNS

Pratiques collectives et questions foncières

© Renaud Perrin

Une palabre initiée par Antoine Devillet et Thomas Figuera

Il y a presque deux ans, la Ville de Marseille rachetait le McDonald’s de Sainte-Marthe pour pérenniser le projet solidaire et social de l’Après M lancé par d’ancien·nes salarié·es – mettant ainsi fin à la menace d’expulsion que le géant du fast-food faisait planer.

Face aux assauts de la privatisation, les initiatives citoyennes se multiplient ces dernières années pour renforcer les usages collaboratifs afin d’interpeler les collectivités et négocier la transformation des politiques urbaines locales. Parallèlement, certaines collectivités tentent d’ouvrir la gouvernance des communaux aux habitant·es.

Comment projeter alors ce partenariat public-commun ? En quoi le modèle des communs peut-il devenir un outil pour une réappropriation des institutions municipales ? Et dans quelle mesure les collectivités peuvent-elles en retour protéger les communs et les encourager ? Ces derniers devraient-ils cohabiter avec les communaux ou s’y substituer ? Comment les différents partenaires s’emparent-ils aujourd’hui de cette notion et qu’y projettent-ils ?

POUR ALLER PLUS LOIN

Decouvrir l’expérience des 8 Pillards à Marseille

Ecouter le podcast Foncièrement Communs

S’instruire et expérimenter avec l’Architecture School of commons.

INTERVENANTS

Le Collectif des Habitant·es Organisé·es du 3ème arrondissement de Marseille
Le CHO3 est un collectif d’entraide et de lutte qui s’appuie sur le principe de la « démocratie d’interpellation ». L’objectif est de réunir un maximum de personnes subissant une injustice commune, pour créer un rapport de force avec l’entité responsable de l’injustice. Le collectif s’implique notamment dans l’accès au droit, dans la lutte contre l’habitat indigne, et dans la sécurité et l’autonomie alimentaires.
https://changerdecap.net/2022/09/29/collectif-dhabitants-cho3-marseille/

Christophe Roux
est infirmier au Château en santé, un centre de santé communautaire porté par une association à but non lucratif, qui s’adresse aux habitants des quartiers de Kalliste, la Granière, la Solidarité, les Bourrely, à Marseille. Il propose des consultations de médecine générale, des entretiens sociaux ou infirmiers, un suivi orthophonique dans la limite des places disponibles. Ce lieu est aussi un espace de rencontre autour d’un café, d’échanges sur la santé, sur le « prendre soin », de réflexions collectives, avec les habitants et les professionnels du territoire sur les besoins en santé du territoire, sur le fonctionnement d’une telle structure, sur les moyens de favoriser l’accès aux soins et de lutter contre les inégalités sociales de santé.
www.chateau-en-sante.org

La DAR
La Dar est un lieu aux multiples facettes, qui accueille depuis 2013 des ateliers autogérés, cantines et soirées de soutien, projections, discussions et assemblées générales … Un lieu toujours plus en commun, grâce au soutien des dynamiques collectives, un outil collectif mis au service du quartier, des luttes et de ce qui nous anime dans nos vies marseillaises.
La Dar est un Centre Social Autogéré : un espace d’autonomie collective, géré par et pour ses usager·es. C’est aussi : Un local de quartier (ateliers, soutien scolaire, distribution alimentaire…) ; Un lieu d’auto-organisation et de luttes pour les assemblées d’habitant.es, celles des personnes sans papiers, des précarisé.es et pour les mouvements sociaux… ; Une cuisine collective (cantines, maraudes) ; Un espace de convivialité, avec une bibliothèque, des concerts et des spectacles.
C’est un espace ouvert, autogéré et non marchand, accessible à tous•tes. Nous souhaitons voir la Dar comme un outil et un espace d’organisation pour les personnes et collectifs du quartier, comme un lieu dont tous•tes peuvent se saisir pour proposer des activités, faire vivre leur projet ou investir les ateliers et espaces existants.
www.la-dar.org

EN CHANTIER
S’épanouissant depuis 2008 au cœur du quartier de la Belle de Mai, l’association EN CHANTIER a construit au fil des années un écosystème porteur de valeurs telles que le respect, le partage, la confiance, la solidarité et le plaisir. Cet écosystème, structuré autour de deux projets relevant de l’économie sociale et solidaire, « La Cantine du midi » et l’épicerie « la Drogheria », est devenu un point repère pour les habitants du quartier de la Belle de Mai. C’est un véritable lieu de vie, d’accueil inconditionnel, au contact des réalités et des problématiques du territoire et tâchant d’apporter une réponse collective, sensible et solidaire. L’association se développe autour d’une double affirmation : la promotion d’une alimentation saine et de qualité, accessible pour tous, s’appuyant sur des circuits courts et une production agricole locale et la valorisation de la dimension interculturelle, intergénérationnelle et sociale de la cuisine et des traditions culinaires. Cuisiner ensemble à la Cantine du midi, co-gérer le Drogheria, élaborer des ateliers de fabrication de pain, confectionner et distribuer des paniers repas solidaires, etc. Les actions de l’association s’adressent à tous les habitants, comme aux bénévoles extérieurs, quel que soit l’âge, la condition sociale, la situation administrative, la maîtrise de la langue.  
Elles permettent de développer les compétences individuelles, renforcer la confiance en soi et le pouvoir d’agir, et de lever les contraintes financières entravant l’accès à une alimentation saine et durable.
L’association EN CHANTIER est par ailleurs agréée en qualité d’Entreprise Solidaire et d’Utilité Sociale, au titre de l’Éducation Populaire et de la Jeunesse et au titre de l’engagement de Service Civique. Elle développe des actions en faveur de la mixité sociale et de l’interculturalité avec et pour les habitants du territoire prioritaire de la Belle de Mai, dans le 3ème arrondissement de Marseille. Elle participe aux dynamiques économiques et solidaires de ce quartier qui se situe à la jonction entre l’hyper-centre et les Quartiers Nord de Marseille. 
Depuis 30 ans, ce quartier fait face à une paupérisation croissante qui se traduit par une précarité socio-économique importante, liée aussi à un habitat de plus en plus insalubre, une carence en équipements publics et une difficulté d’accès aux droits. L’observatoire de le Pauvreté. Les vagues successives d’immigration ont fait de ce quartier un territoire cosmopolite et multiculturel et son tissu associatif l’a doté d’une culture d’entraide et de solidarité.
www.enchantier.org

L’École des communs de l’alimentation
est un projet qui se donne pour objectifs l’interconnexion, la visibilisation et le renforcement des pratiques de transition alimentaire dans le champ des communs. Porté par B.A.BALEX, Artfactories Autres parts et Remix the Commons, ce projet se déploie à travers quatre chantiers, à Marseille, Toulouse, Montreuil et Autrans.

Les États généraux des sols vivants
sont portés par un collectif en cours de constitution, qui revendique une autre politique des sols et arpente actuellement différents lieux-jalons de Marseille (vallon des Hautes Douces, Colinéo, Foresta…). La tenue des états généraux est prévue pour fin 2023, en même temps que la signature d’un plaidoyer en faveur des sols vivants et terres fertiles, que les différents acteurs et actrices déclineront et feront vivre sur le territoire marseillais.

le Collectif Etc
Le Collectif Etc est une association loi 1901 déposée depuis janvier 2011, basée à Marseille depuis 2014 et dans la Drôme depuis 2021. Le collectif est aujourd’hui composé d’un collège solidaire de quatre architectes salariés permanents, une administratrice ainsi que d’une vingtaine de collaborateurs réguliers. La structure expérimente des modes d’autogestion depuis ses débuts. ”Nous souhaitons soutenir des initiatives de changements social et environnemental par l’acte de faire. A travers des expérimentations diverses mobilisant nos compétences en construction bois et métal, conseils, édition, réalisation de films, couture, sérigraphie et autres, en France et en Europe, nous testons l’hypothèse d’une architecture frugale et généreuse. Autant de pistes de sortie à une manière de produire de l’espace énergivore et pyramidale.”
Entre 2011 et 2012, le Collectif a réalisé son Détour de France sur le thème de la « fabrique citoyenne de la ville ». La même année, il est lauréat d’Europan 11 et du Palmarès des Jeunes Urbanistes. En 2014, il fonde avec d’autres la cabane d’édition Hyperville. « Elle se veut le réceptacle de ces pratiques, documentant des mouvements actuels. Elle est aussi volontariste, nourrissant et encourageant des organisations et des actions sur un large réseau. », et publie son premier ouvrage : « Le Détour de France. Une école buissonnière ».
En 2016, il ouvre un lieu dans le quartier de la Belle-de-Mai à Marseille, l’Ambassade du Turfu. « Sa mission est de déployer des actions utiles et conviviales pour le quartier et ses habitant-e-s, en partageant ses savoirs-faire pittoresques et hétéroclites. Elle dispose d’espaces de vie et de travail partagés par des associations d’utilité pratique et des artistes activistes. » En 2018, notre collectif intègre l’équipe menée par Encore Heureux comme co-scénographe et constructeurs pour la 16ème Biennale d’architecture de Venise. Le thème des Lieux Infinis témoigne de notre regain d’intérêt pour l’échelle architecturale et notre volonté de transposer nos outils et notre expérience de chantiers vivants et d’expérimentations. En 2021, le Collectif Etc quitte Marseille pour s’installer dans la Drôme. Les enjeux des territoires ruraux nous poussent à installer notre activité hors de la ville, tout en continuant à sillonner les routes pour d’autres projets. Les projets de lieux nous intéressent toujours d’avantage, comme témoigne notre travail à la Place des Possibles où nous installons notre atelier, et celui du Chalutier où nous installons nos bureaux.
Nous recevons également le soutien d’Erasmus + pour un nouveau projet de recherche-action autour des lieux, de la ruralité et des pédagogies alternatives : une école des communs (Architecture School of commons).
www.collectifetc.com

Foncièrement Commun
Foncièrement Commun est une série de podcasts qui part à la rencontre de collectifs qui occupent et font vivre des lieux auparavant désaffectés.
En redonnant vie à des espaces, ils interrogent le rapport entre les nouveaux usages qui s’y inventent et les liens qu’ils tissent avec le territoire.
Au fil des mois, nous rencontrerons celles et ceux qui font ces lieux et qui portent ces dynamiques. Pour connaître et comprendre leurs histoires, mais aussi pour partager les enjeux et problématiques qu’ils affrontent et dépassent au quotidien. Nous mettrons en avant les logiques de maitrise foncières aux quelles ils se retrouvent souvent confrontés, et qui est un sujet déterminant dans la poursuite de ces expériences.
https://soundcloud.com/communs-marseille

Les 8 PILLARDS
L’association collégiale les 8 Pillards s’est formée au printemps 2019, autour et à partir d’un lieu, de structures et d’individu·e·s. Ensemble iels réhabilitent entièrement l’ancienne usine de métallurgie Pillard, située dans le quartier Bon Secours à Marseille (14° arr.) pour en faire un lieu de création, de production et de vie. Composée d’une soixantaine d’acteur·ice·s, dans le domaine des arts visuels, scéniques, de l’architecture, du design, de l’artisanat, de l’urbanisme, ou encore de l’alimentation, les Pillard·e·s représentent une communauté de travail inspirée, expérimentent des pratiques urbaines en réponse aux défis environnementaux et témoignent de manière plurielle ce que signifie aujourd’hui être artiste, artisan·e ou architecte.
Chaque entité développe et singularise son activité propre au côté des autres résident·e·s, croise et partage ses compétences et ses expériences et initie de nouvelles propositions hybrides. Par l’écoute, en mutualisant désirs, temps, fragilités et savoirs-faire, iels inventent au quotidien le fonctionnement des 8 Pillards, son «genius loci» son avenir et ses interactions avec son environnement. Riche de leurs sensibilités multiples et inhabituelles, iels croient en un monde nourri d’imagination, fabriqué par l’expérimentation collective et l’échange. Iels cultivent des espaces potentiels et une pluralité de manières de faire où le foisonnement, la différence, l’attention et le droit à l’erreur deviennent des terreaux propices à l’épanouissement de chacun·e.
Les structures résidentes sont À Plomb’Bureau des guides GR2013Cabanon VerticalCollectif ETCEn ChantierF.A.I.R.E ‣ La Cale ‣ Groupe Artistique Les Pas Perdus ‣ Studio Pi; Les artistes résidents sont Alouette sans tête ‣ Matthieu BertéaPierre BlanchardTiphaine CalmettesClaire Camous Geun Young HwangJérémy LaffonGuy-André LagesseAhram LeeCatherine MelinThomas MollesAlexandra-Isis PetracchiÉmilie RossiFrancis Ruggirello ‣ Thomas Savelli ; Les ami·es allié·es sont La ConfiserieChugluLe MoulonRaboulunHun
www.les8pillards.com

Antoine DEVILLET
Antoine Devillet est chercheur en philosophie au sein du Bureau des guides du GR2013, à l’interstice entre enquêtes philosophiques, paysagères, artistiques et fabrique de communautés territoriales collectives citoyennes. Il est diplomé en philosophie des sciences à l’Université Libre de Bruxelles suite à la défense de son mémoire sur les récifs artificiels comme trajectoire technique figurant les mutations au sein des pratiques de biologie de la conservation.
www.bureaudesguides-gr2013.fr

Thomas FIGUERA 
Thomas Figuera est chercheur en droit et en architecture. Diplômé de l’École nationale supérieure d’architecture de Marseille, il a travaillé sur l’élaboration d’un commun en centre-ville d’Athènes, où il a co-développé un atelier de construction participatif. Actuellement en thèse, il étudie entre autres l’ex-Asilo Filangieri de Naples, un commun urbain auto-institué et autogéré.

Photos de © Pierre-Yves Brunaud / Illustrations de © Renaud Perrin et de © Loïc Legros