© Renaud Perrin
Après quatre jours riches en rencontres, ateliers et débats autour de la thématique Réhabiter Marseille, la journée « Agir en territoire marseillais » a proposé le 28 avril 2023 un arpentage du territoire par des balades et conversations hors-les-murs. L’une d’elle posait la question de faire « Terres communes » dans le quartier de la Belle de Mai dans le troisième arrondissement de Marseille. Cheminant du Jardin des rails de la Friche la Belle de Mai au jardin du Couvent Levat, elle s’est construite par les récits des habitant·es, collectifs et associations qui œuvrent à faire « Terre commune », à façonner l’espace public, par le soin collectif d’espaces végétalisés.
La question des espaces végétalisés est brûlante à la Belle de Mai. Quartier dense, peuplé de 18 000 habitant·es, il souffre d’une carence d‘espaces publics qualifiés et particulièrement d’espaces végétalisés, ce qui en fait notamment un point chaud de l’îlot de chaleur qu’endure Marseille chaque été. Les espaces végétalisés recouvrent une préciosité multiple : pour cultiver, pour prendre l’air, pour se réunir, pour accueillir de la biodiversité, et leur usage collectif est une requête récurrente dans la Belle de Mai. Ils représentent alors un enjeu nodal, au cœur de toutes les thématiques explorées pendant la semaine « Terres communes »: l’agriculture urbaine, la gestion en commun des ressources, le dessin d’un territoire par les pratiques collectives.
L’expérience des jardiniers à la Friche a été racontée par Hélène Froment, jardinière du Jardin des Rails, et la balade s’est poursuivie au Jardin du Couvent Levat. Le collectif l’Hydre, en charge du jardin, a pu raconter les enjeux et expériences avant de laisser des associations de quartier telles que Culticho du Collectif Organisé des Habitants du 3ème (CHO3), ou l’association En Chantier.
La journée s’est ponctuée de récits, mais aussi débats et controverses : ces espaces sont-ils communs ? Quel rôle pour chacun·e dans la fabrique d’espaces communs ? Pour le Jardins des rails : comment entre-on ? Pour le jardin Levat : des habitant·es ont rappelé la lutte qu’ils ont mené pour en faire un commun. D’une superficie de deux hectares, le Jardin Levat illustre la difficulté de la gestion d’une ressource, à la croisée de nombreux intérêts : il faut en effet en ouvrir l’accès au plus grand nombre, tout en préservant sa qualité. Du temps de la présence des sœurs du couvent, le jardin était fermé au public, son ouverture récente demande une adaptation progressive : zone en repos, rotation des prairies, indications des cheminements, répartition des usages sur le site… Cette réalité côtoie la demande urgente d’accès à cette ressource précieuse pour les enfants du quartier, des structures d’insertion, des centres sociaux ou centres aérés… Aujourd’hui un mix d’usage se crée, entre espace libre, espaces protégés, espaces d’agriculture et espaces d’accueil évènementiel. Déborah et Jean, du collectif l’Hydre, ont raconté la création du collectif des jardins de la Belle de Mai qui met en relation des structures d’accueil d’enfant, des espaces, et des structures de jardinage afin de mailler le quartier, répartir les besoins, les usages…
La balade a été l’occasion de questionner la gestion partagée et les défis qu’elle porte en son sein, la question de l’alimentation dans un quartier paupérisé, mais aussi montrer la diversité des voix et la richesse des initiatives citoyennes, propres au dynamisme associatif de la Belle de Mai.
Deborah (l’Hydre): Merci d’être là, dans cette sortie un peu dehors de la semaine de Terres Communes. Je ne sais pas si vous avez subi un peu toute la semaine avec les conférences, avec des interventions aussi d’acteurs locaux. Nous, on est aujourd’hui dehors, donc ça fait du bien. On sort, on va dans l’espace. Et cette balade, elle a été un peu à l’initiative d’Hélène, qui est là, et de Mathilde aussi, et de Stéphane de La Friche. Ils sont venus nous voir en nous disant que ça serait bien qu’on aille à la rencontre des espaces où certaines communautés s’activent. Donc nous c’est L’hydre, c’est Déborah ici et Jean, on va se présenter un peu plus tard aussi au fur et à mesure de la journée. Donc l’idée aujourd’hui c’est de, donc ça va être long comme vous avez vu le programme, On est ici au jardin des rails, ensuite on va un peu parler de cet espace, ensuite on va aller au couvent Levat. Et l’idée c’est de se poser la question, quels espaces créent quelles communautés ? Et quelles communautés créent quels espaces ? Alors ça paraît un peu vague comme ça, mais quand on parle d’espaces, nous on est des paysagistes, On se pose toujours la question de c’est quoi le type de sol, c’est quoi la couverture végétale, c’est quoi les usages, etc. Et quand on pose la question de quelle communauté, un peu aussi à l’issue de toute cette semaine, c’est de se demander quelle gouvernance cette communauté met en place. Est-ce qu’il y a des principes de gestion ? Est-ce que c’est juste de l’appropriation de l’espace et peut-être déjà ça fait communauté ? On ne sait pas. Donc on s’est posé un peu toutes ces questions-là et on va naviguer entre différents spots de la Belle de Mai et pour garder un peu en ligne de mire cette grande question quels espaces créent quelles communautés et quelles communautés créent quels espaces. C’est un peu décrypter les modes opératoires des terres communes, on va dire. Et cet après-midi, on va mettre un peu tout ça en débat. On aura aussi des acteurs qui gèrent ces espaces-là ou qui sont impliqués d’une manière ou d’une autre, donc des habitants et des habitantes. Et on va aussi peut-être un peu élargir la question en ayant peut-être un point de vue critique. sur tout ça. Essayer d’en avoir un en tout cas. Parce que c’est vrai que cette semaine, on est toujours dans tout ce qui se passe bien peut-être. Essayer là d’aller chercher quelles sont les failles, quelles sont les difficultés. Qu’est-ce que ça raconte aussi à la Belle de Mai parce que c’est un quartier qui est prisé, on va dire, politiquement. Donc en fait, qu’est-ce que les habitants essayent de mettre en action face à tout ça.
Speaker B: Voilà.
Speaker A: Je n’ai pas un peu trop parlé.
Speaker C: Non, non, c’était très bien. Moi, je trouve que ça… Alors le jardin des rails, c’est assez logique, il y a les rails derrière, c’est comme ça que le nom a été choisi. On s’y dirige et puis on commence à en parler. Ça a été créé en 2013 dans le cadre des quartiers créatifs et il n’y avait rien là, il y avait très peu de verre à la friche. qui ont été polluées, et on a commencé à trimer dur et à amender la terre. Ce jardin partagé, c’est soutenu par la friche. Ce qui veut dire que les habitants qui ont des parcelles, le principe c’est être soit dans la proximité ou travailler là. En fait, c’est assez mixte les usagers. et surtout de partager les parcelles aussi. Même s’il y a des parcelles privatives, ce sont des parcelles partagées, ce qui oblige aussi à se mettre d’accord. Ça aussi c’est intéressant parce que la question du jardin, on pourrait penser que c’est simple, là aussi c’est un peu ce que racontait Déborah, ça crée aussi des conflits. C’est conflictuel le jardinage. Moi je n’avais pas pensé ça avant d’en faire collectivement que ce serait conflictuel. que tout le monde n’est pas d’accord sur la manière de faire, sur qu’est-ce qu’on va planter. Tous les enjeux, en fait, s’expriment. On y va ?
Speaker B: Allez.
Speaker D: C’est un aspect que je n’avais pas imaginé, l’aspect conflictuel.
Speaker C: Au Jardin Levas, on pourrait en parler aussi. Même entre nous.
Speaker D: Non, mais maintenant, c’est…
Speaker E: C’est pas très humain tout ça.
Speaker D: Il y a un banc, profitez-en.
Speaker C: Oui, il y a des bancs pour s’asseoir, il y a des chaises si vous voulez. Alors ici c’est la parcelle historique, parce qu’il y a eu une autre parcelle qui a été mobilisée. Quelques années après, je n’ai pas trouvé de traces, donc je pense que c’est deux ans après, il y a eu une autre parcelle qui a été dédiée au Jardin des rails. Et aussi ce qu’on avait fait à une époque. Donc le principe, on a une convention sur un bout de parcelle qu’on partage et on a aussi une fois par mois des ateliers collectifs. Alors, ça marche plus ou moins, ça aussi, parce que c’est aussi difficile à nos époques, des fois, de mobiliser les gens collectivement sur des chantiers, sur les parties communes. C’est un peu comme dans les copropriétés. On s’occupe de son appartement, mais on a du mal à s’occuper aussi des parties communes, des escaliers, de tout ce qui est le commun. Et le commun, c’est quelque chose qui va nous animer toute cette journée. On a fait aussi, entre les 2 parcelles, on a planté des plantes de la Méditerranée, du thym, du romarin, des choses comme ça. Et on faisait aussi du nettoyage. les grands chantiers qu’il y a eu. Je vais laisser Jean peut-être prendre le relais, parce que… Donc c’est Jean qui, aujourd’hui, depuis maintenant deux ans, deux-trois ans, est l’animateur, je vais mettre des guillemets, parce que je ne sais pas quel est exactement le… Enfin, le référent. Allez, on va dire le référent du Jardin des rails.
Speaker E: Le jardin, son fonctionnement, c’est comme l’a dit Hélène, je ne sais pas si tu t’es présenté, mais toi tu as une parcelle et tu jardines là. Donc moi je suis un peu le, on va dire, en termes de gouvernance, du coup on a dit il y a l’Afrique, et il y a moi qui suis le paysager jardinier, on va dire un peu l’expert, qui va permettre de faire la coordination entre c’est à qui ce terrain et à qui on le transmet, qui peut l’avoir aussi, parce qu’au final c’est sur des conventions, chacun a son bout, etc. Du coup il y a cette gestion de qui a quoi, et jusqu’à quand on l’a plus. parce qu’il n’y a pas beaucoup de parcelles quand même, il y a une trentaine de personnes qui peuvent profiter entre guillemets de cet espace de jardinage. Du coup il y a des envies aussi extérieures. Donc moi je dois essayer de m’occuper un peu de ça et d’animer des temps collectifs qui ne sont pas forcément faciles à faire, tout à fait. Même si on se dit que c’est toujours chic, ça marche toujours, on fait des trucs en commun, Il y a plein d’individus qui ont plein d’emplois du temps et ça ne marche pas forcément de faire des trucs collectifs. Ce n’est pas grave non plus en fait, il n’y a pas de drame non plus là-dedans. On est des fois cinq alors qu’on aimerait être tous là au même moment, etc. Ben non, ça ne marche pas. Et ce n’est pas pour autant que ce ne sont pas des bons moments, des moments d’échange, etc. C’est déjà bien aussi, il faut se satisfaire de ça. L’autre fonctionnement c’est aussi Par exemple, pour savoir qui peut avoir une parcelle, j’ai hérité ça de la personne qui gérait ça aussi avant. C’est Avoldoiseau, la personne la plus proche du jardin. Ce qui est pas mal, parce que le jardin, ça veut dire aussi… Du coup, ça questionne le temps collectif, pourquoi il y a des gens qui peuvent pas venir. Et c’est… Pour pouvoir jardiner, faut être pas loin, faut y aller un peu régulièrement quand même. C’est pas… C’est un travail, quand même. Du coup, il faut… C’est une sorte de sélection, ça sera le plus proche du jardin. Ça questionne un peu la relation aussi, voilà, du coup, déjà, de l’espace, comment on peut avoir, entre guillemets, accès à un espace, aussi, sa proximité avec cet espace. Du coup… pour se recentrer sur une échelle de population qui est proche du site.
Speaker F: Comment ça marche ? Comment ça tourne ? Une fois qu’on a une parcelle, est-ce qu’on se l’approprie et on l’a pendant dix ans ? Ou alors est-ce que ça tourne justement l’idée du collectif, de partage ? Moi j’habite à côté, ça m’intéresse. Elle le sait.
Speaker C: Je pense que tu vas être le bienvenu là. Je pense, parce que Pierre, avec qui je jardinais, il va avoir un jardin, donc il va s’occuper de ce jardin, et puis il va être plus loin. Donc je pense que c’est noté. Je note, mais voilà, je note.
Speaker E: Ça bouge en fait, oui, ça bouge. Tout simplement.
Speaker B: Peut-Être je peux juste refaire un petit bond dans le temps parce qu’on n’a pas parlé du avant le jardin des rails je sais pas si vous connaissez tous la friche, la friche ancienne manufacture de tabac qui a été récupérée il y a maintenant 30 ans par des artistes et producteurs culturels donc qui hérite quand même d’une zone très bétonnée donc il y a aussi cette idée aujourd’hui qui nous intéressait de mettre un miroir entre cette zone très urbaine très bétonnée et le couvent qui, puisqu’il appartenait à des sœurs, a été très protégé et est resté une zone de sol vivant. On va revenir sur ces thématiques. Et en fait, l’histoire du végétal à la Friche, c’est intéressant parce que c’est assez intimement lié à l’histoire de la Friche en général. qu’on a des artistes et des producteurs culturels qui s’emparent de ce lieu et qui vont faire des tests, qui vont expérimenter des usages. Et en fait, au fil des années, on va avoir une institutionnalisation. On va se mettre aux normes pour l’accueil du public. Donc, en fait, on va figer des usages qui étaient plus en expérimentation avant. Donc là, vous avez le jardin des rails qui date de 2013. On est d’accord. Voilà. Mais il y a eu des expérimentations avant. qui venaient historiquement plutôt de l’action culturelle. Donc c’est des personnes, notamment Emmanuel Bouchité, qui travaillait dans l’association, qui coordonnait la gestion du lieu, une artiste marionnettiste, Marie-Jo Ordener, enfin voilà. Donc on a des personnes qui ont eu des volontés Et c’est comme ça que ça se passait quand même à la Friche à l’époque, c’était un peu un grand terrain de jeu sur lequel on allait expérimenter des désirs. Donc elles qui s’occupaient de l’action culturelle, elles ont voulu embarquer des classes relais de CP-CE1 et leur faire des ateliers. de découverte du cycle des plantes. Donc voilà, ici il y a eu des jardinières qui ont été installées, il y a eu des espèces de bassines qu’elles récupéraient et dans lesquelles elles faisaient grandir des tétards pour l’observation des enfants. Il y a eu des expérimentations d’usage de plantes avant que le jardin des rails ne fixe en fait et ne stabilise l’usage ici. On a Sébastien qui est à l’exploitation qui vous racontera aussi un petit peu après la gestion des espaces végétalisés à la friche. Mais voilà l’idée c’est de se dire il y a eu toute une expérimentation et ensuite qui a été figée en 2013 comme beaucoup des choses ici parce que Pour ceux qui ne le savent pas, 2013, Marseille Capitale Culturelle, c’est l’année où vont s’ouvrir énormément d’espaces d’exposition, donc on va figer quand même les usages de ce lieu. Un petit mot aussi sur le fait que le végétal, ça a toujours été un vecteur de lien au territoire, à l’Afriche. Par exemple, il y avait au début une jardinière à l’entrée, à côté du grillage, qui ensuite, avec l’arrivée du magasin de skate et tous les aménagements a été détruite. Mais à l’époque, il y avait des grandes jardinières à l’entrée. Et par exemple, les deux personnes dont je vous parlais avaient planté un caprier. mais en fait elles ont eu la bonne idée de le planter en juillet et après il y a le mois d’août où quand même la friche se vide et notamment les gens qui travaillent ici quittent les lieux et donc elles avaient demandé aux mamans et aux professeurs des classes relais avec lesquels elles intervenaient ici de prendre soin du capri et sachant que c’est une plante assez fragile qui demande un Le mois d’août à Marseille, ça demande un certain soin. que ça allait être compliqué pour la survie. Et quand elles sont revenues, il y avait eu toute une mobilisation, justement, et une vraie demande, puisque les gens étaient venus s’occuper du Caprier et ça a lancé des dynamiques. Et on voit que, quand même, le travail du sol est fédérateur dans le quartier, sûrement. C’est le cas partout, je ne peux pas monter en généralité. Mais voilà, donc il y a toujours eu ce lien avec le quartier qui était intéressant autour de ces espaces. Aujourd’hui, on a ces espaces figés, ça pose des questions sur la gestion du commun, ça va être le fil rouge de toutes nos discussions aujourd’hui. Qu’est-ce que la gestion du commun, le prendre soin ensemble, la gestion collective, est-ce qu’on a tous droit au chapitre dans la gestion, dans la prise de décision de la gestion des espaces ? Quelle forme d’encapacitation, puisque c’est ça aussi le travail du commun, c’est de se réapproprier à la fois des espaces, des ressources communes, mais aussi des savoir-faire, des manières de faire. Donc voilà, c’est un petit peu tout ça qui va nous animer aujourd’hui. Est-ce que Nicolas, peut-être en tant qu’usager, tu veux aussi témoigner un petit peu ?
Speaker D: Je peux finalement confirmer un peu tout ce qui a été dit. Moi j’ai une parcelle ici, là, où justement il y a ma femme, mes beaux-parents, mes enfants qui sont en train de cueillir des petits pois. depuis cinq ans. En effet, ce que je trouve intéressant avec l’histoire que Mathilde vient de raconter, c’est comment les usages ont évolué avant que les jardins des rails soient fixés. On peut dire qu’aujourd’hui, ça profite à moins de monde, mais mieux. Il y a une trentaine de personnes qui peuvent utiliser cet espace-là et l’utiliser sur la durée. C’est intéressant, on peut vraiment cultiver, faire pousser, se nourrir avec. Et en même temps ça pose la question, comme Francis tu le disais, comment est-ce que ça tourne ? Est-ce que ça tourne ? Comment on peut avoir accès ? Alors je sais que tous les jardiniers qui sont là sont attentifs en tout cas à pouvoir faire rentrer les gens qui sont curieux, à leur expliquer comment ça fonctionne, à faire goûter des choses. Souvent il y a des enfants qui viennent attraper des grains de raisin, qui veulent aller voir. Donc il y a cette attention là, mais pour autant ça ne répond pas à les multiples demandes de gens du quartier qui sont aussi dans une proximité réelle et finalement qui ne savent pas très bien comment ils pourraient éventuellement participer. Moi le premier, je pense que j’ai eu une place de façon un peu par hasard. J’ai acheté un appartement, celui-là avait une place au jardin et finalement j’ai récupéré la place. Mais quelque part il n’y avait pas de règlement intérieur qui permettait de dire concrètement comment ça pouvait se passer. Et donc moi ça m’interroge aussi à l’endroit où je suis, où je peux bénéficier de davantage et en fait pourquoi d’autres ne peuvent pas ou qu’est-ce qu’il y a eu finalement. Je pense qu’on arrive peut-être à un moment aussi où il faut réfléchir à comment on peut remettre ça en question, qui le réfléchit, comment on le réfléchit. Comment peut-être, je ne sais pas, c’est sur deux ans, trois ans, et puis ensuite il faut que ça tourne. Donc il y a tous ces usages-là qui sont intéressants, je pense, à questionner. Le commun, qui, combien de temps ? Je pense que c’est des questions qui sont intéressantes. Je confirme aussi que c’est, voilà, enfin, sur les temps d’animation, c’est les temps d’échange, mais on aimerait bien être plus parfois. Mais pareil, le premier, je ne suis pas là à tous les temps, parce que pris dans les réalités du quotidien. Donc ça interroge aussi sur comment on fait vivre le commun. les questions de conflits d’usage. J’ai mis une structure pour faire de l’ombre, mais les voisins d’à côté trouvaient que ça leur faisait trop d’ombre. Pour moi, je ne pouvais même pas imaginer qu’on puisse avoir trop d’ombre à Marseille. Mais en fait, si on ne prend pas le temps de discuter, on se rend compte que tout est à questionner. sur ma parcelle, mais ça c’est des conflits qui sont constructifs, qui sont intéressants. Justement on crée de l’usage avec ça, donc ça c’est plutôt intéressant.
Speaker C: Est-ce que vous arrivez à créer des espaces de discussion ?
Speaker D: Alors, pour être très honnête, je dirais que finalement l’occasion d’aujourd’hui permet de verbaliser ces choses-là, et donc peut-être que ça va générer une discussion collective pour mettre ces sujets-là en débat, parce qu’au final, finalement, assez peu, c’est les questions qui sont posées, mais vu qu’il n’y a jamais tout le monde, tout ça, Donc je pense que chacun trouve aussi, quand on a une parcelle, on est content de l’avoir, on n’a pas forcément envie de la remettre en jeu et pourtant c’est intéressant de le réfléchir. Donc je pense qu’un moment comme celui-ci permet de poser ses sujets et après à nous, usagers, à la friche, à l’hydre, de s’emparer de ça et de voir comment le remettre peut-être au travail. Est-ce qu’il y aurait la possibilité d’avoir peut-être des espaces, d’autres espaces, pour justement répondre à la demande croissante peut-être de gens qui…
Speaker E: On va peut-être ressortir du jardin et voir que… Après on pourra faire un point final sur l’Afrique avant de partir pour mettre en comparaison aussi avec ce qu’il y a d’autre en fait dans l’Afrique parce que c’est vaste. Et oui, du coup cette question que je rebondis sur, C’est petit, c’est un tout petit commun, un petit groupe de personnes. A combien on veut le donner ? Merde. Pardon. Sur le truc général, quoi. Le bien commun, vraiment à tous, etc. Mais est-ce que c’est concrètement faisable ? Pas du tout, en fait.
Speaker B: Et est-ce qu’on a la place ?
Speaker E: Et est-ce que, en fait, aussi, c’est pertinent de l’avoir fait ici ? Parce qu’en fait, le sol, il est pas bon, on galère, il y a des gens que ça décourage… Enfin, techniquement, en fait, c’était peut-être pas non plus le meilleur endroit pour essayer de faire ce truc commun, c’est peut-être… Est-ce que ça vient pas du sol, de la chaleur à la friche qui fait que… ça décourage, du coup les gens viennent peut-être moins, et du coup on fait moins de trucs collectifs parce qu’en fait ça pousse pas, je vais pas m’investir moins. Enfin, il y a un truc aussi technique aussi à se reposer, qu’on va peut-être aller voir, continuer à voir dans la friche, comme question. Et après on peut peut-être se dire, l’idée c’est de présenter un petit peu le nouvel aménagement qui a été fait, je sais plus combien, tout le temps, juste derrière nous.
Speaker C: Et les petites hostiles ne font pas partie de l’aménagement.
Speaker E: Non.
Speaker C: Les petites hostiles ne font pas partie de l’aménagement.
Speaker D: Il y avait une autre question de quelqu’un.
Speaker E: Est-ce qu’on fait les questions après ? Peut-être qu’on la fait après, avant de partir de l’Afrique. Je vous invite à sortir du jardin.
(…)
LE LABOFRICHE
Espace de croisements des regards, le LaboFriche prend la forme de rencontres, d’ateliers et d’enquêtes participatives afin de mettre en partage, débat et action les sujets de société qui traversent la Friche et son territoire : transition écologique, insertion et formation, alimentation, économie informelle, etc.
Il devient un espace tiers au sein de l’écosystème de la Friche et permettra d’ancrer ses communautés (créatives, scientifiques, citoyennes) dans l’ère de la facilitation culturelle.
Le LaboFriche a pour ambition de faire de la Friche et du quartier de la Belle de Mai un « territoire apprenant », afin que les acteur·ices de la Friche comme les habitant·es du quartier partagent leurs savoirs, et renforcent leurs capacités de coopération pour agir sur les incertitudes relatives à un monde en transition (écologiques, urbaines, sociales, démocratiques, éducatives).
Une action de la Friche la belle de mai, en partenariat avec le Campus AFD.
L’HYDRE
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EN CHANTIER
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Le collectif d’habitants CHO3
Entre situations urgentes et démocratie d’interpellation
CHO3, pour Collectif des habitants organisés du troisième arrondissement de Marseille, fonctionne sur le principe d’un syndicat d’habitants. A la frontière du centre-ville et des quartiers nord, le 3ème arrondissement de Marseille est considéré comme l’un des quartiers les plus pauvres de France. L’Observatoire des inégalités estime que 25 000 des 45 000 habitants sont considérés comme « pauvres ».
Le fonctionnement
L’objectif est de « se réunir entre personnes qui subissent des injustices sur ce territoire, de trouver un maximum de personnes qui subissent ces mêmes injustices, puis d’identifier qui est responsable d’une injustice ou d’une autre : parfois une institution, parfois une entreprise ».
CHO3 peut ensuite créer un rapport de force avec le responsable de l’injustice, des discriminations… C’est ce que le collectif appelle « la démocratie d’interpellation ».
La caractéristique de ce syndicat d’habitants est d’être tout terrain. « Dès qu’un habitant va nous parler d’une colère ou d’une injustice, de ce qu’il peut vivre, on va chercher un maximum de voisins qui disent la même chose. ». L’organisation de la lutte est alors systématiquement verticale, le collectif va toujours s’adresser à des gens « qui ont plus de pouvoir que nous ». Concrètement et par exemple, sur la question de la propreté, « on ne va pas s’attaquer à l’incivilité de voisins qui ne font pas de tri sélectif, mais à la métropole dont l’une des prérogatives est la gestion des déchets ».
La diversité constitue un principe important de CHO3, le collectif se voulant représentatif des différentes communautés et classes sociales présentes dans ce 3e arrondissement marseillais. Plus de 1000 personnes sont aujourd’hui engagées.
Le confinement 2020, avec notamment l’arrêt du travail informel et la fermeture des lieux d’urgence sociale, aura finalement permis d’inaugurer des solutions de solidarité comme une plateforme téléphonique, du compagnonnage entre voisins… « Cela a créé des solidarités assez fortes ».
Une problématique
Le collectif souligne le tiraillement entre l’envie de démocratie d’interpellation (« faire respecter et gagner nos droits »), donc le moyen terme, et la réponse aux urgences des membres, le court terme.
« On ne va pas à la guerre avec le ventre vide »
Le long terme consisterait à essayer de « construire des alternatives ce qui est ce qui est en place et à ce qu’on nous propose en termes de ségrégation, de discrimination et d’oppression des habitants des quartiers populaires. Il y a dans cet arrondissement énormément de personnes qui ont des métiers, des savoir-faire, qu’ils ne peuvent pas utiliser faute d’autorisation de travail. En parallèle, ces personnes en demande de papiers participent activement à la vie sociale et économique du quartier.
CULTICHO
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